Allez j'm'en va nous dit Monsieur
Chaque soir avant la fermeture
Sur le trottoir d'vant la devanture
Du bar de l'avenue Montesquieu
Sa main a un peu la tremblante
Mais y paye sans r 'chigner l'ardoise
Mets son chapeau à l'iroquoise
Pis tous les soirs pousse sa gueulante
Y en a marre des marabouts
Qui nous tiennent par des bouts d'ficelle
Y en a marre des ceusses à g'noux
Y en a marre des genoux trop frêles
Marre de la grêle qui nous gronde
Marre des ondes dedans nos têtes
Marre des étoiles au micro-ondes
Marre de l'ondée dessus nos fêtes
Si c'est comme ça moi je m'arrache
J'reviendrais plus bandes d'apache
À vouloir trop vous préserver
Z'allez finir par m'énerver
Monsieur nous dit Allez, j’m'en va
Chaque soir pendant la fermeture
Et puis il s'adosse contre le mur
Pour que le mur reste bien droit
La cigarette virulente
Et puis la colère au poing
Il cognait fort chez les voisins
Pour leur chanter sa p'tite gueulante
Y en a marre des marabouts
Y en a marre des rabougris
Marre du gris dans le ragout
Y en a marre des gouts aigris
Marre des écrits au cognac
Marre d'l'ammoniac dans le café
Marre des fées tout feu tout trac
Marre des accidents de mafé
Si c'est comme ça moi je m'arrache
J'reviendrais plus bandes d'apache
À vouloir trop vous préserver
Z'allez finir par m'énerver
Mais un jour on a vu monsieur
Nous dire j'm'en va, et s'en aller,
ça nous a fait un drôle d'effet
D'un coup c'est dev'nu silencieux
Puis il est r'venu d'entre les morts
En disant c'est marre je reste un peu
Laissez-moi une minute ou deux
Juste pour pouvoir gueuler encore
Y en marre des marabouts
Et d'vos économies d'chandelles
Faut la bruler par les debout
C'est debout que la flamme est belle
Y en a marre des amarantes
Et des amantes à l'oeil moqueur
Marre des hauteurs de la tourmente
Et marre des essoufflés du coeur
Marre du cœur entre deux chaises
Marre des chaises de bureaucrate
Y en a marre des catachrèses
Des encrisées en cravate
Marre de tout les va t'en guerre
Marre des gens exaspérés
Y en a marre d'être en colère
Marre d'vous entendre soupirer
Et sans adieu, et sans une tache
Il partira l'dernier apache
Alors m'parle pas d'me préserver
Tu finirais par m’énerver